Le baromètre 20211 de l’assureur Gras Savoye Willis Towers Watson sur l’absentéisme en entreprise a jeté un pavé dans la marre au moment de sa parution en août 2021. On y apprend que le taux d’absentéisme en France a augmenté de 20% en 2020, atteignant 5.04% du temps de travail théorique.

Si noter une hausse du nombre d’arrêts maladie dans un contexte de crise sanitaire relève presque de la lapalissade, en s’intéressant au phénomène de plus près, on constate que l’augmentation de l’absentéisme au travail est loin de se cantonner aux arrêts maladie pour cause de covid.

La définition de l’absentéisme est ainsi plus large : il s’agit d’une incapacité à travailler dont la cause n’est ni prévisible ni régulière : arrêts pour maladies ordinaires, accidents de travail, maladies professionnelles et absences injustifiées2.

Quelle qu’en soit la cause, l’absentéisme perturbe par définition le fonctionnement de l’entreprise. Sa hausse doit donc constituer un signal d’alerte pour la Direction des Ressources Humaines.

Une explosion de l’absentéisme depuis le début de la crise sanitaire

Challenges3, qui propose une analyse du baromètre Gras Savoye Willis Towers Watson, met en avant une statistique éloquente : 34% des employés des entreprises françaises ont été arrêtés en 2020, ce qui représente une hausse de plus de 6 points par rapport à 2019. Cette progression concerne tous les secteurs économiques, hormis les cafés, hôtels et restaurants qui ont dû garder leur rideau baissé pendant plusieurs mois en 2020.

Le journal de l’économie4 précise que les secteurs les plus impactés par la hausse de l’absentéisme sont la santé et la logistique avec des taux respectifs de 10% et 8% (contre 7.59% et 6% en 2019). Dans les faits, l’augmentation concerne davantage les non-cadres puisqu’ils ont en moyenne manqué 7% de leur temps de travail (contre 5.7% en 2019) tandis que chez les cadres, la hausse est moins importante : 2.42% en 2020 contre 2.17% en 2019.

Cette hausse de l’absentéisme en entreprise serait, en grande partie, liée à la crise sanitaire. Ainsi Courrier Cadres5 relève que trois facteurs ont été prépondérants pendant l’année 2020 : les arrêts de travail pour garde d’enfant, pour vulnérabilité au covid-19 ou pour cohabitation avec une personne vulnérable. À cela s’ajoutent les cas positifs au covid ainsi que les cas contacts, contraints de s’isoler. Au total, 47% des arrêts maladies de la première moitié de l’année 2021 étaient liés de manière directe ou indirecte au covid-19 selon l’Observatoire des situations de travail de Malakoff Humanis6.

Un dernier facteur d’absentéisme lié à la crise sanitaire doit également être pris en compte. Il s’agit de celui lié au deuil. En effet, l’épidémie ayant tué plus de 116 000 personnes en France depuis son commencement, de nombreux salariés se sont trouvés endeuillés. Ainsi, selon une étude d’Empreintes-Credoc-CSNAF décryptée par le journal Sud Ouest7l’absentéisme lié au deuil a considérablement augmenté depuis 2 ans : en 2021, 67% des Français affectés par un deuil ont dû suspendre leur activité professionnelle au moins une fois, contre 43% en 2019. Selon les résultats de l’enquête (8), ces absences peuvent alors prendre la forme d’une autorisation d’absence, d’un arrêt maladie, d’un congé sans solde ou encore d’une mise en disponibilité (dans la fonction publique).

Des causes structurelles de l‘absentéisme qui nuisent à l’engagement des collaborateurs

Si l’impact de la crise sanitaire sur l’absentéisme au travail est indéniable, en considérant les chiffres de ces dernières années, il apparaît que sa hausse avait commencé bien avant 2020. En effet, selon le baromètre Gras Savoye Willis Towers Watson1, entre 2016 et 2019, le taux d’absentéisme en entreprise avait augmenté de 16%, passant de 3.61% à 4.18%.

À noter que la fonction publique n’est pas en reste puisque selon un rapport de la Cour des comptes rendu public le 9 septembre 2021 et décrypté par Le Point9, le nombre annuel de jours d’arrêts maladie par agent a augmenté de 21% entre 2014 et 2019.

Parmi les causes de la hausse de l’absentéisme ces dernière années, l’étude Gras Savoye dénonce notamment :

  • une perte de sens dans le travail
  • une usure professionnelle
  • des risque psychosociaux croissants
  • un manque de reconnaissance
  • un équilibre fragile entre les sphères personnelle et professionnelle
  • un manque de formation des managers.

Challenges10 note toutefois une disparité structurelle entre le taux d’absentéisme des femmes et celui des hommes. En effet, en 2020, il était de 6,08% pour les premières, contre 4,52% pour leurs homologues masculins. Noémie Marciano, Directrice Offre de Conseil Health & Benefits chez Gras Savoye, explique alors que « les surcharges de travail, la pénibilité des tâches ou le manque de reconnaissance » jouent un rôle important dans l’absentéisme féminin. À ces causes professionnelles, s’ajoute le poids de la sphère personnelle puisqu’au sein du foyer, les femmes prennent encore majoritairement en charge « les tâches domestiques, l’éducation des enfants, ou encore le soutien d’un proche en fin de vie ».

Quel que soit le genre des salariés, l’ensemble des facteurs précédemment cités contribue à détériorer leur engagement, comme le souligne Laurent Termignon, directeur de l’activité Talent & Rewards de Gras Savoye dans un article de Focus RH11. Un cercle vicieux se forme alors entre désengagement des collaborateurs et absentéisme au travail : « le manque d’engagement des collaborateurs a tendance à aggraver l’absentéisme, et un absentéisme élevé peut nourrir le désengagement« .

Des répercussions financières importantes et une prise de conscience progressive de la part des entreprises

Les conséquences de la hausse de l’absentéisme pour les entreprises ne sont pas neutres. En effet, Noémie Marciano précise sur BFM Business12 que : « l’absentéisme en entreprise engendre des coûts directs et indirects, comme le maintien de salaire et le financement d’un régime de prévoyance, le recrutement d’un remplaçant mais aussi la baisse de la productivité et la désorganisation ». Challenges10 pointe par ailleurs du doigt un coût indirect particulièrement difficile à estimer : la dégradation du climat social causée par l’absentéisme.

En additionnant ces différents coûts liés à l’absentéisme, le baromètre Gras Savoye1 démontre que, pour une entreprise de 1 000 salariés avec un salaire annuel moyen de 30K€ et un taux d’absentéisme de 5%, le coût complet pour l’employeur se situe entre 1,5 et 3 millions d’euros par an.

Face à ce constat alarmant, les Directions des Ressources Humaines se mettent progressivement en ordre de marche pour améliorer l’engagement de leurs collaborateurs et ainsi agir sur l’absentéisme galopant. Selon Focus RH11 qui détaille les résultats d’une étude menée par Gras Savoye auprès de 120 DRH en début d’année 2021, accroître l’engagement des collaborateurs va être l’un des défis majeurs de la fonction RH dans les prochaines années. En effet, 36% des DRH estiment que l’amélioration de l’engagement des salariés est l’une de leurs préoccupations principales.

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